La navigation exigeant la connaissance des conditions météorologiques, des navires marchands recueillent des observations dès le XVIIe siècle. À partir de 1937, afin d’améliorer la prévision sur la France et l’Europe occidentale, le service météorologique national déploie ses propres navires d’observation stationnaires en divers points de l’Atlantique nord.
La connaissance des conditions météorologiques est essentielle à la navigation. C’est pourquoi, depuis le XVIIe siècle, tous les capitaines de Marine rédigent des journaux de bord de leurs traversées rendant compte de leurs observations météorologiques, notamment sur les vents et les précipitations. C’est le cas du capitaine de L’Erigone, parti en expédition, depuis le port de Brest, dans les mers de Chine, le 28 avril 1841 (retour le 4 juin 1844).
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Les observations simultanées en météorologie (observations faites à un même instant en différents lieux) ont été mises en application dès 1873 pour les navires comme pour les stations terrestres. En plus des observations ordinaires, l’observation simultanée est réalisée à midi (temps moyen de Greenwich). En 1892, le navire à vapeur Marie n’échappe pas à la règle : il renseigne trois fois par jour sa position (longitudes comptées par rapport au méridien de Paris), la force et la direction du vent, la pression atmosphérique, la température, l’état du ciel et de la mer.
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Le caboteur Marie, affecté à l’exploitation de la ligne Bordeaux-Le Havre-Hambourg pour le transport de marchandises (en particulier de vins bordelais), fait partie des premiers navires à effectuer des observations météorologiques simultanées. Il navigue sous le pavillon de la compagnie Worms, de décembre 1869, date de sa mise en service, jusqu’à son naufrage le 25 décembre 1897.
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Le cargo Le Floride, de la Compagnie générale transatlantique, affronte au début de l’année 1914 une très forte tempête au large de la Virginie. Le rapport de mer de l’observateur permet au service météorologique français de documenter de tels événements en Atlantique. Il relate avec précision le déroulement de la tempête et les routes suivies par le navire.
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Longtemps, les observations réalisées à bord des navires, utiles du point de vue climatologique, sont restées inexploitables pour la prévision faute de pouvoir être transmises en temps réel. Le développement des transmissions radio, au début du XXe siècle, va en permettre la diffusion. En France, à partir de 1921, l’Office national météorologique équipe d’une station météorologique le Jacques Cartier qui fait la ligne des Antilles pour le compte de la Compagnie générale transatlantique.
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De 1921 à 1929, le Jacques Cartier navigue sur l'Atlantique nord et le Pacifique le long des côtes américaines, tout en collectant les observations de navires volontaires sur l’Atlantique pour les transmettre à des stations terrestres. Interrompue, sa mission est reprise d'une façon plus opérationnelle par le Carimaré en 1937.
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L’une des premières fonctions du Jacques Cartier est d’être une station météorologique océanique transmettant des messages météorologiques quotidiens en français et en anglais (via la Tour Eiffel) et réalisant des prévisions. Son premier voyage, en octobre 1921, a été l’occasion d’alerter pour la première fois sur l’existence d’un cyclone dans le sud de Cuba (B sur la carte), dangereux pour les navires allant des Bermudes au canal de Floride.
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Le Jacques Cartier est équipé d’un barographe pour enregistrer le rythme des variations de la pression atmosphérique. Ces dernières sont tracées sur un graphique pour constituer un barogramme. Son étude permet de prévenir les tempêtes ou au contraire, de savoir si une amélioration durable se profile.
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En 1937, avec le Carimaré, la France installe son premier navire météorologique stationnaire, à l’est des Bahamas, jusqu’en 1939. Les navires stationnaires occupent un point fixe au milieu de l’océan, selon un cadre coordonné au niveau international. Leur déploiement permet d’observer les zones de propagation des dépressions, ce qui est essentiel pour la production météorologique à destination des marines mais aussi de l’aéronautique.
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D’août 1937 à septembre 1939, le Carimaré est affrété par l’Office national météorologique. Il effectue des campagnes de trois mois en Atlantique nord pour l’observation, le recueil des messages météorologiques et la transmission des éléments de situation aux avions traversant l’océan. Le Carimaré est doté d’une station de radiosondage. Les informations qu’il recueille sur l’état de l’atmosphère sont aussitôt transmises par radio à l’Office national météorologique.
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À la fin de la Seconde Guerre mondiale, avec l’essor du trafic aérien commercial sur l’Atlantique nord, se met en place le réseau NAOS (North Atlantic Ocean Station). Ce réseau se compose de neuf stations en Atlantique nord dont une est confiée à la France. Quatre anciens navires de guerre américains (rebaptisés Laplace, Le Verrier, Le Brix et Mermoz) s’y relaient pour effectuer en continu des relevés météorologiques. Le point fixe choisi pour les observations est le point L (39° nord, 17° ouest).
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De 1949 à 1958, quatre navires météorologiques (Laplace, Mermoz, Le Brix ou Le Verrier) assurent une présence permanente en Atlantique, notamment au point K (45°nord, 16°ouest). Ces navires étaient d’anciens bateaux de guerre rachetés par la France aux États-Unis.
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À partir de 1958, les quatre navires météorologiques sont remplacés par les frégates France I et France II qui occupent le point K en alternance, pour des campagnes de vingt-quatre à vingt-six jours. À compter du 15 novembre 1974, le point géostationnaire en Atlantique nord est déplacé pour la France au point R (Roméo : 47°N-17°W).
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L’avènement de la météorologie spatiale, la généralisation des stations automatiques, dérivantes ou stationnaires, et la multiplication de stations embarquées sur des navires marquent la fin de l’utilisation des navires météorologiques stationnaires. Leur activité cesse le 31 décembre 1985.
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Si l’arrivée de la météorologie spatiale marque la fin des observations en un point précis de l’océan par les navires météorologiques stationnaires, les navires continuent toutefois d’effectuer des observations météorologiques à travers toutes les mers du monde et d’émettre des messages SHIP. Jusqu’au début des années 2000, la plupart remplissent encore à la main un carnet pour consigner leurs observations météorologiques.
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